La transmission du nom de famille a longtemps été perçue comme l'héritage indiscutable du père. Le code civil belge restreignait ainsi les choix quant à la transmission du nom de famille, faisant de la transmission du nom du père la règle, et la transmission du nom de la mère l’exception (principalement lorsqu’il n’y avait pas de père légal). Face à une société moderne cherchant plus d'égalité entre les sexes et à une plus grande mobilité internationale influençant la transmission des noms, le droit de nommer un enfant a évolué.
La loi du 8 mai 2014 modifiant le code civil en vue d'instaurer l'égalité de l'homme et de la femme dans le mode de transmission du nom à l'enfant et à l'adopté a marqué un premier tournant en permettant aux parents d’enfants nés après le 1er juin 2014, date d’entrée en vigueur de la loi, de choisir entre le nom du père/de la coparente, le nom de la mère ou une combinaison des deux noms, dans l’ordre qu’ils souhaitent.
Malheureusement, la réforme de juin 2014 ne couvrait ainsi pas les personnes adultes voulant changer de nom de famille pour se voir attribuer le nom de la mère, du père, de la coparente ou le double nom.
Pour ces adultes, le changement de nom de famille restait un processus complexe. Ces derniers devaient en effet introduire une demande de faveur auprès du Service des changements de nom du Service Fédéral de Justice et justifier des motifs graves. La notion de motif grave étant peu précise, nous constations en pratique de nombreux refus du SPF Justice, notamment lorsque les motifs graves étaient basés sur des motifs psychologiques. Les concernés n’avaient alors d’autres choix que d’introduire une procédure d’appel des décisions devant le tribunal de la famille. A mesure des années, nous avions constaté que certaines juridictions étaient conscientes des difficultés rencontrées pour démontrer des motifs graves d’ordre psychologiques, de sorte qu’elle se « se contentaient » d’une « vraisemblance suffisante » (voir la Newsflash du 18 juillet 2023 ). De telles procédures étaient toutefois très longues et décourageantes pour bon nombre de personnes. Continuer à cadenasser à ce point le demandes de changement de nom était tout à fait illogique dans un contexte plus général où le nom de famille était moins figé.
Le 1er juillet 2024, la loi du 7 janvier 2024 modifiant l'ancien Code civil et le Code des droits d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe en vue d'assouplir la procédure de changement de nom (Loi du 7 janvier 2024 modifiant l'ancien Code civil et le Code des droits d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe en vue d'assouplir la procédure de changement de nom, M.B. 19 janvier 2024, p. 7479.) a marqué une nouvelle avancée matière de changement de nom. Les adultes belges, ainsi que les mineurs émancipés, les réfugiés reconnus et les apatrides, peuvent désormais changer leur nom de famille pour adopter celui d’un ou des deux parents/adoptants de manière simplifiée. Il leur suffit dorénavant de de se présenter à la commune pour introduire leur demande, et ce sans conditions particulières. Le traitement de la demande est en principe d’un mois, sauf extension du délai à trois mois en cas de consultation du Procureur du Roi pour les dossiers plus complexes. Cette simplification concerne uniquement les changements de nom pour adopter celui ou ceux des parents.
Les demandes de changement de nom visant adopter un autre nom que celui du père/de la coparente, de la mère ou une combinaison des deux noms restent soumises à l’ancienne procédure auprès du service des changements de nom du Service Fédéral de Justice, en ce compris la preuve de motifs graves.
Cette simplification est bien entendu une excellente nouvelle. En permettant une flexibilité accrue et en réduisant les barrières administratives, ces changements reflètent une société en évolution.
On regrette toutefois que cette loi n’ait pas englobé d’autres situations inutilement complexes en matière de changement de nom, notamment la situation des enfants mineurs nés après le 1er juin 2014. Pour ces derniers, pour l’instant, il n’est possible d’obtenir un changement de nom que si leurs parents ont un nouvel enfant et qu’ils demandent à cette occasion un changement de nom pour uniformiser le nom de toute la fratrie. A défaut, une procédure devant le SPF Justice reste nécessaire.
Céline Verbrouck
Avocate associée Altea
Spécialiste en droit des étrangers et droit international privé de la famille