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Droit administratif et constitutionnel
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Droit familial international

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Actualités


violence conjugale

Regroupement familial et violences familiales

Le 21 septembre 2020, le GREVIO (Groupe d'experts du Conseil de l'Europe sur l'action contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique) a publié son premier rapport d’évaluation relatif à la mise en œuvre par la Belgique des dispositions de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (ci-après Convention d’Istanbul).

Parmi les - encore trop nombreuses – violations de la Belgique, le GREVIO relève le manque de protection des victimes de violences dans le cadre d’un regroupement familial.

En droit belge, la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers (ci-après loi du 15 décembre 1980) conditionne la délivrance d’un permis de séjour aux membres de la famille d’une personne autorisée au séjour en Belgique au respect de différentes exigences (selon les cas, ressources et logement suffisants, lien d’alliance ou preuve d’une relation stable, etc.). Durant les (trois ou cinq) premières années, le droit de séjour du membre de la famille n’est pas autonome et est ainsi en principe maintenu uniquement si les conditions du regroupement familial perdurent. Lorsque la relation qui a permis l’obtention du titre de séjour prend fin, ce titre de séjour pourrait être retiré.  

Fort heureusement, des exceptions à ce principe sont prévues pour les victimes de violences conjugales qui peuvent, sous certaines conditions, maintenir leur droit au séjour malgré une séparation.

Comme le dénoncent le GREVIO et le monde associatif, ces exceptions prévues en droit belge - bien qu’a priori rassurantes – demeurent toutefois lacunaires et ne respectent pas les exigences de la Convention d’Istanbul.

L’article 59 de la Convention d’Istanbul requiert en effet notamment des Etats signataires qu’ils protègent toutes les femmes dont le statut de résident dépend de celui de leur partenaire ou parent et qu’ils leur délivrent un permis de séjour autonome.

Or, en droit belge, les exceptions au retrait de séjour sont prévues actuellement uniquement pour certains types de regroupements familiaux, à savoir les regroupements des ressortissants de pays tiers avec un Belge, un Européen, un ressortissant de pays tiers bénéficiaire d’un titre de séjour illimité, ou un ressortissant de pays tiers bénéficiant d’une protection internationale en Belgique (articles 11, §2, al. 4 et article 42 quater, § 4, 4° de la loi du 15 décembre 1980). Ne sont ainsi par exemple pas couverts les regroupements familiaux d’un ressortissant de pays tiers avec ressortissant de pays tiers bénéficiaire d’un titre de séjour limité (justifié autrement que par une protection internationale), ainsi que les regroupements familiaux entre un Européen et un Belge ou entre deux Européens.

Certaines victimes non couvertes n’ont alors d’autres solutions que de faire une demande de séjour pour circonstances exceptionnelles, sur base de l’article 9bis de la loi du 15 décembre 1980. Ces demandes 9bis sont des faveurs laissées totalement à la discrétion de l’Office des Etrangers (ci-après OE), sont soumises au paiement d’une redevance, et n’entrainent de surcroît aucun délai légal de réponse. Une telle pratique ne répond pas aux exigences de la Convention d’Istanbul.

Même dans les hypothèses où la victime peut théoriquement bénéficier de l’exception, le maintien du droit au séjour est conditionné à la preuve d’un travail ou de ressources suffisantes et d’une assurance maladie dans le chef de la victime, ce qui limite l’accès à une protection effective pour toutes les victimes. S’il est vrai qu’à la suite d’un arrêt de la Cour Constitutionnelle belge du 7 février 2019 (Cour constitutionnelle, n°17/2019; du 7 février 2019) jugeant ces conditions comme étant discriminatoires et violant les articles 10 et 11 de la Constitution, l’Office des Etrangers a changé sa pratique et déclare ne plus vérifier ces conditions, elles demeurent néanmoins toujours dans la loi. 

Une fois la violence avérée, la victime demeurera titulaire d’une carte F si elle est membre de la famille d’un Européen ou d’un belge. Un tel type de carte, toujours lié au regroupement familial, ne répond pas à l’exigence de permis de séjour autonome.  

Relevons encore que la protection belge n’est accordée qu’au moment de la prise de décision sur le maintien du droit au séjour et donc, lorsqu’initialement le droit au regroupement familial a déjà pu être reconnu. Par contre, la période antérieure à l’introduction d’une demande et toute la période d’analyse du dossier par l’administration après le dépôt de la demande ne sont pas couvertes. Sachant qu’il peut s’écouler de très longs mois avant qu’une décision positive au fond soit prise suite à une demande de séjour liée à un regroupement familial, la loi belge actuelle a pour effet de maintenir certaines victimes dans une situation excessivement précaire et ne protège pas toutes les femmes comme l’exige la Convention d’Istanbul.

Au surplus, le texte de la Convention d’Istanbul exige également que les Etats signataires désignent les éléments de preuves à fournir pour démontrer la violence subie (Convention d’Istanbul, Rapport explicatif, point 303). Rien, dans la loi belge ne répond à l’heure actuelle cette exigence de sorte que cela est laissé à l’appréciation totale de l’Office des étrangers. Sachant que les violences – particulièrement psychologiques – sont par nature difficiles à prouver, que des interprétations différentes sont parfois données par les sections francophones et néerlandophones de l’Office des étrangers, un tel manquement donne lieu à une insécurité juridique préoccupante.

Notons qu’une proposition de loi a été déposée le 22 octobre 2019 dans le but d’étendre la protection à la période de traitement de la demande de regroupement familial sous attestation d’immatriculation et de supprimer les conditions de ressources et d’assurance pour les victimes (Proposition de loi modifiant la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce qui concerne la protection des victimes de violence intrafamiliale dans le cadre du regroupement familial, Document parlementaire 55K0654). Cette proposition de loi, si elle est adoptée, permettrait de répondre en partie aux exigences de la Convention d’Istanbul. En tout état de cause, des modifications législatives additionnelles ou à tout le moins une révision de la pratique, seraient toujours nécessaires pour garantir un permis de séjour autonome à toutes les victimes et la prévisibilité des éléments probants requis.  

De telles modifications sont essentielles, non seulement pour répondre aux besoins impérieux des femmes victimes, mais aussi pour que la Belgique remplisse – enfin - ses obligations internationales puisque, rappelons-le, la Convention d’Istanbul est un texte contraignant dans le Royaume depuis le 1er juillet 2016 déjà (https://www.coe.int/fr/web/istanbul-convention/belgium)

Kenya Pigneret et Céline Verbrouck 
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